Le dernier restaurant avant la fin du monde

Il faut 30 heures pour atteindre le bout du monde. 30h de bateau à travers le détroit de Magellan et le canal Beagle, en compagnie des dauphins, otaries et pingouins. Une succession de glaciers et de montagnes les pieds dans l’eau, témoins de couchers de soleil irréels.

coucher de soleil

Une mission du ferry-cargo est de réapprovisionner les minuscules communautés totalement isolées le long du canal Beagle. Il fera un arrêt à un “poste-frontière” où vivent une poignée de soldats qui attendent avec impatience cette visite rare et précieuse.
A l’issue de la navigation se trouve la dernière île habitée avant le Cap-Horn et l’Antartique, l’île de Navarino. Notre destination est Puerto Williams, la ville la plus australe du continent, le bout du monde.

Conforme à l’idée que l’on peut s’en faire, l’endroit est calme, petit village entouré de sommets enneigés et peuplé de familles de militaires (l’endroit est stratégique)… et de quelques pêcheurs.

Une fois par mois, le ferry-cargo va réapprovisionner la communauté de Puerto Toro, peuplement le plus austral du monde, qui compte 15 habitants dont un professeur, un officier de la marine et sa famille, et des gendarmes. Le gouvernement propose à toute personne présente à Puerto Williams de se joindre gratuitement à la traversée afin de rompre l’isolement de la communauté.

puerto toro

Karina, une estonienne tombée amoureuse de la région, organise à cette occasion une petite randonnée dans la nature environnante. Les chaussures recouvertes de gadoue après une première descente sont vite nettoyées par l’eau qui impregne les tourbières que l’on traverse sans causer de dégâts (impossible si la zone était fréquentée). Nous avons tous le sourire aux lèvres en nous enfonçant dans le sol à chaque pas.

tourbiere

La balade aboutira à une petite plage après avoir passé un barrage de castors. Puis c’est l’heure de faire demi-tour. Les aurevoirs à Puerto Toro sont émouvants, les habitants regardant du quai le bateau s’éloigner.

De retour à Puerto Wiliams, nous retrouvons notre hôtel et son restaurant- le plus au sud de la ville-, le dernier restaurant avant la fin du monde. Comme à son habitude, le propriétaire un peu désorganisé nous propose au hasard des plats dont nous ignorons le prix (et lui aussi nous semble-t-il). Ceci dit, c’est bon et Gustavo est fort sympathique. Nous jetons tout de même un coup d’oeil à la note qui s’allonge depuis plusieurs jours: 42, il est temps d’y aller.

ponton du bout du monde

Nous retraverserons la frontière argentine en zodiac cette fois. 20 minutes de traversée, qui a bien faillie être annulée à cause du vent. Celui-ci peut être extrêmement violent à ces latitudes -nous nous en étions déjà rendus compte à Punta Arenas, où il peut facilement renverser les piétons inattentifs. Heureusement, l’autorisation a finalement était donnée. Ici, comme le disent les locaux, le climat change si rapidement qu’il y a quatre saisons par jour.

L’étape suivante est la Terre de feu et sa capitale, Ushuaia. L’ambiance y est bien différente, la ville moderne et touristique, sert de point de départ pour les croisières en Antartique. Pour la première fois du voyage, nous avons bien cru nous retrouver sans logement: tout était complet!
La visite du parc national de la Terre de feu nous a un peu déçus après ce que nous avions pu voir sur l’île de Navarino et lors de la traversée sur le canal Beagle. Côté positif, il y a de nombreux restaurants, avec des cartes (si si), et nous pouvons donc goûter au fameux King crab, d’une taille impressionnante.

L’été austral (10°C) c’est bien, mais quitte à être dans l’hémisphère sud, nous voulons profiter de l’été avant notre retour en France qui approche à grands pas.
La fin du monde, c’est fait. En route pour le soleil!

fin del mundo